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Consultation moins remboursee par la Secu? Vers davantage d’inegalites, alertent des experts

octobre 15, 2024

Le projet du gouvernement de transferer 1 milliard d’euros de depenses de la Securite sociale vers les mutuelles va creuser les inegalites d’acces a la sante, alertent des experts et des acteurs du secteur.

Pour tenter de reduire le deficit croissant de la Secu, l’executif prevoit d’abaisser le taux de remboursement par l’Assurance maladie des consultations des medecins et sages-femmes de 70% a 60%. Il reviendrait aux complementaires sante – ou au patient lui-meme, s’il n’en a pas – de prendre en charge la difference.

Mais ce projet d’economies « est un leurre, couteux et dangereux », a rapidement denonce le premier syndicat des medecins generalistes, MG France.

Les complementaires sante repercuteront la nouvelle depense mise a leur charge sur les cotisations des assures, menant au « glissement accelere d’un systeme solidaire (celui de la Secu) a un systeme ou la couverture est fonction de la cotisation », fustige le syndicat.

Les Francais payeront plus cher, « sans amelioration du contrat », s’insurge aussi le syndicat de medecins UFML-S, rappelant en outre que les 2,5 millions de Francais sans complementaire sante seront « durement impactes », contraints de payer de leur poche.

De fait, les premieres estimations realisees par les experts du monde de l’assurance montrent que le projet du gouvernement devrait provoquer une hausse des cotisations autour de 2% a 3%, selon les hypotheses retenues.

– « Aucun effet redistributif » –

« Un transfert de l’ordre d’un milliard vers les complementaires sante entrainerait une augmentation moyenne de 2,8% des prestations versees par celles-ci et donc une augmentation similaire des cotisations », selon le cabinet specialise Addactis.

« Mais cette evaluation est une moyenne : elle masque des augmentations plus fortes sur les contrats +entree de gamme+ », pour lesquels la part non remboursee par la Securite sociale pese plus, « ou sur les populations seniors, pour lesquelles les frequences de consultations medicales sont les plus elevees », avertit-il.

Meme diagnostic pour Cyrille Chartier-Kastler, autre expert assurantiel, qui evoque un « impact » de « plus ou moins 2,8% » pour les depenses des complementaires, qui devra se retrouver dans les cotisations.

La hausse des cotisations sera d’autant plus durement ressentie que les complementaires sante ont deja pratique des hausses particulierement fortes en 2024 (+8,1% en moyenne), epinglees par un recent rapport senatorial.

« Pour obtenir un affichage de baisse des depenses publiques, on fait le choix d’augmenter les depenses privees contraintes » (comme les cotisations aux complementaires), qui sont « plus inegalitaires » et « moins efficaces », juge l’economiste Nicolas Da Silva, enseignant-chercheur a l’universite Paris 13. Il pointe « les frais de gestion des complementaires, en moyenne de 19-20% contre 4% pour la Secu ».

Contrairement a cette derniere, dont les cotisations augmentent en fonction du niveau de revenus, l’assurance complementaire privee « n’a pratiquement aucun effet redistributif », observent les services statistiques des ministeres sociaux (Drees) dans un recent rapport.

– 33 a 146 euros par mois –

Ainsi, les primes versees aux complementaires et restes a charge apres remboursement pesent a hauteur de 6% du revenu des menages les plus pauvres (ayant un niveau de vie niveau de vie inferieur a 11.190 euros par an), contre 3% pour les plus aises, « en depit des dispositifs d’aide ciblant les publics precaires », comme la complementaire sante solidaire (C2S), note la Drees.

Les complementaires fixent essentiellement leurs tarifs en fonction de l’age et du niveau de couverture, les prix etant plus eleves pour les contrats individuels que collectifs (contrats d’entreprise).

Les comptes publics de la France (AFP - Bertille LAGORCE, Sabrina BLANCHARD)
Les comptes publics de la France (AFP – Bertille LAGORCE, Sabrina BLANCHARD)

Pour un contrat individuel, la cotisation mensuelle varie de 33 euros en moyenne a 20 ans contre 146 euros a 85 ans, pour un assure « de reference », avec des niveaux de couverture variables, selon la meme source.

Avec une telle politique, le principe fondateur de la Secu, « +chacun contribue selon ses moyens, recoit selon ses besoins+, tend a s’effriter », avec un ciblage de plus en plus precis des personnes entierement remboursees (malades chroniques, beneficiaires de la C2S…), estime Nicolas Da Silva.

L’economiste pointe un risque de « delitement du pacte social » : « une politique dont le nombre de beneficiaires et la qualite baissent » pourrait beneficier « de moins de soutien » de la population.

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