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Crises severes d’asthme : l’espoir des anticorps monoclonaux

novembre 30, 2024

Chaque annee, l’asthme tue pres d’un millier de personnes en France. En cause : des symptomes incontroles qui peuvent, par leur frequence ou leur gravite, mettre en danger la vie des patients. Sensation d’etouffement, poids sur la poitrine, l’air circule difficilement dans les poumons : il s’agit d’une crise d’asthme, ou exacerbation. Une manifestation semblable aux poussees de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO).

En effet, dans les deux pathologies, les voies respiratoires sont obstruees suite a une inflammation locale et un epaississement des parois des bronches. S’il s’agit bien de deux affections distinctes, aux causes differentes, leurs symptomes et leurs traitements peuvent se ressembler a plusieurs egards. Depuis des decennies, leur prise en charge passe le plus souvent par des inhalateurs qui dilatent les bronches et des corticoides par voie orale qui reduisent l’inflammation dans les cas d’asthme severe (5% des asthmatiques) comme, par exemple, le prednisolone.

Mais le 21eme siecle marque un tournant dans le traitement de ces maladies respiratoires grace aux anticorps monoclonaux. Ce sont des molecules immunitaires qui se lient aux cellules a l’origine de l’inflammation, et engendrent leur mort. On savait que leur utilisation en traitement de fond permettait de diminuer la frequence des exacerbations severes. Aujourd’hui, des chercheurs du King’s College (Londres) vont meme plus loin en montrant que ces molecules peuvent etre injectees au moment de la crise, et sont plus efficaces que le traitement classique. Leur etude, soutenue par le laboratoire AstraZeneca UK Limited, a ete publiee dans la revue The Lancet Respiratory Medicine

Inflammation des bronches
Source: BRUNO BOURGEOIS. Source: Un nouveau souffle pour traiter l’asthme severe

Un anticorps monoclonal, qu’est-ce que c’est ?

La biotherapie par anticorps monoclonaux a deja fait ses preuves dans le traitement de maladies inflammatoires chroniques, et son usage ne cesse de s’etendre. En 2023, une nouvelle molecule faisait son apparition dans la prevention de la Brochiolite chez le nourrisson, une autre etait developpee pour traiter l’asthme severe. Cet outil prend de l’ampleur mais comment fonctionne-t-il ?

Les anticorps sont produits par l’organisme quand il est infecte par un micro-organisme. Ils se fixent a la bacterie ou au virus et signalent generalement sa presence a des cellules immunitaires, qui se chargent de l’eliminer. Le meme procede s’opere quand l’anticorps reconnait une cellule etrangere, ou s’attaque par erreur aux cellules de l’organisme.
La capacite des anticorps a reconnaitre une cible precise a attise la curiosite des scientifiques depuis des annees. Aujourd’hui, ils sont capables de produire des anticorps specifiques d’une proteine : on les appelle « anticorps monoclonaux ». Pour cela, les chercheurs mettent en culture des cellules immunitaires, qu’ils exposent a la proteine cible.
De cette technique ont emerge pas moins de 5 molecules contre l’asthme severe depuis les annees 2000. Mais pourquoi autant d’anticorps monoclonaux differents ?

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Adapter la molecule a son asthme

L’asthme est en realite pluriel. Ses causes peuvent etre liees a differentes cellules en fonction du patient et sont donc variables. Aujourd’hui, il est possible d’identifier individuellement la voie metabolique qui aboutit a l’inflammation, et donc de prescrire les anticorps monoclonaux adaptes. Une solution qui permet aux patients atteints d’asthme severe de reduire leur prise de corticoides, qui ne sont pas anodins. Dans leur nouvelle etude, les chercheurs du King’s College ont utilise une molecule deja prescrite dans les cas d’asthmes severes : le benralizumab. « Il s’agit d’un anticorps monoclonal qui cible des globules blancs specifiques, appeles eosinophiles, pour reduire l’inflammation pulmonaire, » eclairent les scientifiques.

Les Eosinophiles sont des cellules immunitaires, des globules blancs, impliques dans differentes pathologies. Elles sont a l’origine d’une hyper reactivite des bronches et de leur inflammation. Le muscle lisse qui tapisse les parois des voies respiratoires se contracte, ce qui aboutit a leur retrecissement (remodelage). Les eosinophiles provoquent aussi une hypersecretion de mucus.

Les chercheurs ont divise la cohorte en trois groupes, en fonction du traitement administre en cas d’exacerbation : l’un recevant une injection de benralizumab et des comprimes placebos, l’autre recevant le traitement standard a base de prednisolone, ainsi qu’une injection placebo et le troisieme groupe recevant a la fois l’injection de benralizumab et les comprimes de prednisolone.

Results? Le point d’etape 28 jours apres la crise montre une amelioration significative des symptomes pour les patients ayant beneficie d’une injection immediate de benralizumab. « Apres 90 jours, le nombre de personnes ayant echoue au traitement etait quatre fois inferieur dans le groupe sous benralizumab par rapport au traitement standard a base de prednisolone », ajoute l’equipe du King’s College. Suite a cette injection, la qualite de vie des patients s’est amelioree, et les crises ont nettement diminue, rapporte l’etude. « Le benralizumab est deja utilise pour traiter l’asthme severe. Nous l’avons utilise d’une maniere differente – au moment d’une exacerbation – pour montrer qu’il est plus efficace que les comprimes de steroides, qui constituent le seul traitement actuellement disponible », conclut Mona Bafadhel, chercheuse principale de l’etude. Pour les scientifiques, il s’agit de cibler les patients souffrant d’asthme severe pour leur proposer ce traitement, adapte a leur niveau d’inflammation.

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