Les quelque 1.500 medecins conseil de l’Assurance maladie, qui jouent un role clef dans la lutte contre la fraude ou dans l’octroi des prestations et remboursements, sont au coeur d’un projet de reforme qui fait craindre pour leur independance et inquiete les syndicats.
La direction de l’Assurance maladie souhaite que ce service medical, longtemps dote d’une certaine independance fonctionnelle, se fonde dans l’organisation generale de l’Assurance maladie.
Selon son projet, presente jeudi au comite social et economique central de la Cnam, les 16 directions regionales du service medical disparaitraient et les 7.200 personnes qui le composent – praticiens et agents – seraient repartis dans la centaine de Caisses primaires d’assurance maladie (departementales).
« Demain, l’organisme qui controle les arrets de travail (entre autres) sera absorbe par les caisses primaires: de quoi craindre une gestion des avis rendus plus comptables et par algorithmes que medicale », deplore une intersyndicale CGT/FO/CFE-CGC.
A l’heure d’un probable nouveau de vis sur les depenses de sante, les syndicats craignent que les medecins conseils, desormais rattaches aux caisses primaires, perdent leur independance et finissent par etre influences par les direction des caisses sur l’octroi du statut d’affection longue duree, l’octroi ou la prolongation d’arrets de travail, les invalidites ou les retraites pour inaptitude. Des decisions cruciales pour les usagers.
Ils redoutent egalement les consequences pour le personnel non medical qui devra se repartir sur tout le reseau des caisses primaires.
« L’annonce brutale de cette suppression a tres breve echeance, a partir du 1er avril 2025, sidere et engendre une grande angoisse parmi les salaries », a souligne l’intersyndicale.
Les agents administratifs qui entourent les praticiens et partagent avec eux le secret medical, redoutent de perdre une specificite de leurs missions « a l’ecoute du patient », explique Cedric Bertet-Pilon, un agent elu CGT de la direction regionale du service medical d’Auvergne Rhone-Alpes.
« Nous savons que tel ou tel patient que nous accueillons a un cancer ou une sclerose en plaques, nous partageons le secret medical. C’est tout cela que les patients risquent de perdre », complete M. Bertet-Pilon.
– Des medecins liberaux s’interrogent –
Le syndicat de medecins liberaux CSMF a fait part egalement de sa preoccupation.
Le service medical de l’Assurance maladie doit donner ses avis « en parfaite independance et dans le respect du secret medical », a-t-il souligne dans un communique jeudi.
« A l’heure ou la Cnam envisage une politique de sensibilisation concernant les arrets de travail, les prescriptions medicales de transport ou les ordonnances bizones (pour les patients en ALD), voir disparaitre a tres court terme le service medical pose question », a-t-il indique en demandant a la Cnam de « clarifier sa position ».
La direction de la Cnam a indique de son cote a l’AFP que l’independance des medecins conseil « serait garantie au quotidien grace a un double systeme d’evaluation » des praticien.
L’aspect medical de son activite ne sera pas evalue par le directeur de sa caisse de rattachement mais par un autre « medecin conseil de profession », a-t-elle dit.
Et « pour prendre en compte les specificites propres a l’exercice medical, la convention collective nationale des praticiens-conseils du regime general de securite sociale est totalement maintenue, ainsi que la gestion nationale de ce corps (en matiere de recrutements et de mobilites) », a-t-elle ajoute.
« Cette logique, qui rapproche les equipes medicales et administratives, existe deja dans beaucoup d’organisations (caisses de Mutualite sociale agricole, ARS, agences sanitaires) », a-t-elle ajoute.
L’appel a la greve lance le jour de la presentation au comite social et economique a ete tres suivi au sein du service medical, selon Cedric Bertet-Pilon qui evoque des taux de participation « de 40 a 100% » selon les regions.
Le comite social et economique central de la Cnam sera appele d’ici a quelques mois a donner un avis sur le projet de reforme. En attendant, les elus ont demande que soit realisee une expertise sur le projet, a indique M. Bertet-Pilon.