C’est une maladie handicapante, encore mal comprise et insuffisamment reconnue. Son nom ? L’hypoparathyroidie (HPT, voir encadre). Elle concerne au moins 100.000 personnes en Europe, des dizaines de milliers dans l’Hexagone. En fait, le chiffre exact des patients n’est pas bien connu, la maladie etant largement sous-estimee bien qu’elle survienne dans 75 % des cas apres le retrait d’une thyroide. Pour certains patients, l’errance diagnostique peut meme depasser dix ans. Oui, dix ans, sans qu’un diagnostic ne soit pose et qu’un traitement ne soit prescrit.
Pour rappel, la PTH est normalement secretee par quatre petites glandes, toutes de la taille d’un grain de riz, accolees pres de la thyroide et au cours d’une intervention pour un goitre ou un cancer, il y a un risque que les glandes soient lesees.
Par consequent, le manque de PTH survient alors rapidement dans les heures ou jours qui suivent l’intervention, avec des troubles de la calcemie se traduisant par differents signes, tant physiques (fatigue, crampes, douleurs, fourmillements) que cognitifs ou emotionnels (voir encadre).
Autant de symptomes atypiques, variables en intensite d’un malade a l’autre, qui s’installent de maniere chronique au cours du temps et qui peuvent s’averer tres fluctuants d’un jour a l’autre, voire d’une heure a l’autre.
La piste ouverte par Epi-Hypo
Evoquee au decours d’echanges organises lors du 40E congres de la Societe Francaise d’endocrinologie (SFE) qui vient de se derouler a Clermont-Ferrand, l’HPT demeure a ce jour mal reperee, ses signes cliniques etant souvent banalises, les anomalies biologiques ne sont pas toujours presentes, cette discordance expliquant le retard diagnostique.
Mais l’HPT est une maladie dotee en France d' »une cohorte unique au monde, la plus importante en nombre de patients« , detaille le Dr Jean-Philippe Bertocchio, nephrologue, Hopital Pitie Salpetriere (Paris).
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Son Nom Epi-Hypo. Tout a commence il y a pres de 10 ans quand, avec un collegue nephrologue, le Pr Pascal Houillier (hopital Europeen Georges Pompidou, Paris), tous deux se rendent compte qu’ils voient tres souvent en consultation des patients HPT en errance venant pour un 2E, 3E, voire 4E avis medical. « L’idee est alors venue de collecter ces cas pour creer ce qui est devenu la premiere cohorte francaise de patients HPT, precise le specialiste. Aujourd’hui grace a la participation de plus de 200 medecins issus de 50 centres prives et publics repartis sur tout le territoire, 1300 patients sont inscrits dans la plus grande cohorte au monde de patients hypoparathyroidiens, la mieux phenotypee et la plus importante en nombre de patients“.
Epi-Hypo a ainsi permis de fournir des informations sur ce temps d’errance diagnostique, d’environ un an pour 40% des patients mais qui peut atteindre et depasser les 10 ans pour plus de 20% d’entre eux.
Cette cohorte permet aussi d’en savoir davantage sur les causes de la maladie. Ainsi, 73% des cas sont lies a une chirurgie thyroidienne, 14% a une origine genetique, une maladie auto-immune ou suite a une irradiation, 13% restant d’origine inconnue.
Mais Epi-Hypo permet aussi de voir que dans un cas sur deux, et ce malgre une calcemie consideree comme normale, les patients sont eux toujours symptomatiques, leur qualite de vie etant alors profondement alteree.
Enfin, Epi-Hypo informe aussi sur les resultats des traitements classiques, une supplementation en calcium et en vitamine D. « En 2017, environ 5% des patients etaient controles, ils sont pres de 30% aujourd’hui », detaille le nephrologue.
Ameliorer la prise en charge
Aujourd’hui, on admet le plus souvent mais sans grande precision qu’apres une thyroidectomie totale, « 90% de patients ne presenteront pas de HPT, 10 % auront une HPT transitoire et sera persistante pour 2 a 9 % d’entre eux, detaille le Dr Cecile Ghander, endocrinologue ( hopital Pitie Salpetriere, Paris). Parmi ces derniers, le nombre de personnes presentant une HPT severe et refractaire aux traitements medicamenteux simples est tout simplement inconnu. Pourquoi ? Peut-etre parce que nous ne parvenons pas a poser les bonnes questions en n’interrogeant pas assez precisement la qualite de vie de nos patients ».
Nul doute que dans le futur la prise en charge devrait s’ameliorer car de nouvelles molecules permettant de pallier le manque de PTH (palopegteriparatide, eneboparatide, encaleret.. ), toutes reservees a ceux qui presentent une HPT severe et refractaire aux traitements classiques, sont attendues.
A la grande satisfaction des patients reunis par l’association Hypoparathyroidisme France, soucieux de faire passer le message suivant : ne plus etre uniquement consideres sous l’angle de leur calcemie qui peut etre normale sous traitement mais que leurs plaintes soient enfin entendues.
Et s’il n’est pas possible pour un patient de s’inscrire directement sur Epi-Hypo, il est toujours possible d’en discuter avec son medecin, generaliste ou endocrinologue, pour y acceder par son intermediaire et de s’inscrire personnellement a la petite soeur d’Epi-Hypo : ComPaRe hypoparathyroidie en cliquant here.
C’est quoi une hypoparathyroidie ?
Il s’agit d’une maladie endocrinienne en lien avec un deficit en parathormone, la PTH, impliquee dans la regulation du calcium.
Son absence se traduit par une baisse de la calcemie dont les symptomes sont variables et peuvent etre physiques (fatigue, crampes, fourmillement, spasmes) mais aussi cognitifs (confusion, difficultes de concentration, troubles du sommeil) ou emotionnels (anxiete, depression, irritabilite… ).
Le traitement conventionnel repose sur une supplementation orale en calcium et vitamine D.
D’autres molecules dites de deuxieme ligne et administrees par injection sous-cutanee quotidienne (palopegteriparatide, eneboparatide, encaleret) sont en train d’arriver sur le marche. Destinees aux formes graves de la maladie, celles refractaires aux traitements oraux, elles sont pour l’instant delivrees uniquement a l’hopital et leur prescription est pour l’instant reservee aux endocrinologues, nephrologues et rhumatologues.