La photographie du mal-etre des jeunes Francais s’affine encore: un peu plus de 8% des enfants de 3 a 6 ans scolarises en maternelle dans l’Hexagone connaissent au moins une difficulte de sante mentale probable, selon une etude publiee mardi.
Il s’agit de la premiere enquete nationale sur la sante mentale qui s’interesse en France aux enfants si jeunes. Et d’un nouveau volet de l’etude epidemiologique sur le bien-etre et la sante mentale des enfants de 3 a 11 ans scolarises en France hexagonale (Enabee) menee par Sante publique France.
En combinant les points de vue des parents et des enseignants sur un echantillon representatif de plus de 2.600 enfants, cette etude, menee en 2022, revele que 8,3% des enfants en maternelle ont « au moins une difficulte de sante mentale probable, de type emotionnel, oppositionnel ou inattention/hyperactivite, impactant leur vie quotidienne ».
Autrement dit, environ un enfant sur douze scolarise en maternelle en France metropolitaine est concerne.
« Ces donnees posent la dimension du probleme de sante publique », a commente a l’AFP Stephanie Monnier-Besnard, epidemiologiste et cheffe de projet de l’etude Enabee. Mais « ce n’est pas une surprise que les enfants si jeunes puissent rencontrer des difficultes de sante mentale probables, c’est coherent avec » toutes les observations.
Et, a-t-elle note, « c’est le meme ordre de grandeur que les resultats d’etudes approchantes en France ou dans des pays assez comparables, comme l’Allemagne ou les Etats-Unis ».
Dans le detail, 1,8% des enfants scolarises de la petite a la grande section de maternelle presentent des « difficultes emotionnelles », 5,9% des « difficultes oppositionnelles », 1,9% des « difficultes d’inattention/hyperactivite », estime l’etude, a partir des donnees recueillies par questionnaire – en ligne ou par telephone- entre mai et juillet 2022.
« Meme si la sensibilite accrue a la sante mentale peut eventuellement conduire a surestimer un peu certains phenomenes, c’est a mettre en balance avec le fait que la sante mentale des enfants a longtemps ete laissee de cote et moins consideree que leur sante physique », a observe Stephanie Monnier-Besnard.
Autre enseignement: les garcons presentent plus de difficultes probables avec retentissement sur leur vie (11,3%) que les filles (5,2%).
« Sur les differences garcons-filles, les resultats sont coherents avec les observations cliniques des professionnels de sante mentale notamment », a declare a l’AFP Nolwenn Regnault, responsable de l’unite « Perinatalite, Petite enfance et Sante mentale » de SpF.
– « Periode critique du developpement » –
Pres de 13% des enfants scolarises en maternelle ont consulte au moins une fois un professionnel de sante pour des difficultes psychologiques ou d’apprentissage lors des douze mois precedant l’etude.
Et environ un tiers des enfants presentant au moins un type de difficulte probable avec un retentissement sur leur vie quotidienne a consulte un professionnel de sante mentale dans l’annee precedente.
« Prudence » cependant sur l’interpretation des resultats, avertit Sante publique France, car « a ces ages precoces, les difficultes de comportement ou emotionnelles peuvent evoluer rapidement et leur mesure est impactee par les perceptions et attentes des adultes repondants ».
Et il ne s’agit pas de diagnostics cliniques mais d’une representation epidemiologique.
Il n’y a « pas de point de comparaison avec l’avant-Covid: Enabee decrit la situation en 2022, une prochaine edition de l’etude permettra de decrire les evolutions du bien-etre et de la sante mentale des enfants », a indique Nolwenn Regnault.
Sachant que « la sante mentale des enfants est etroitement liee a de multiples facteurs », cette etude « permet de les identifier et de cibler les facteurs pouvant l’alterer et ce, des la petite enfance, periode critique du developpement », a souligne le Dr Caroline Semaille, directrice generale de Sante publique France, dans un communique.
Cela confirme la necessite d’intervenir des le plus jeune age et d’ameliorer les dispositifs d’accompagnement en sante mentale avant 6 ans, selon l’agence qui evoque par exemple les competences psychosociales.
Pour les 6-11 ans, 13% presentaient au moins un trouble probable de sante mentale, selon le premier volet de l’etude, publie mi-2023 et integrant aussi le regard des enfants.
La sante mentale avait ete declaree « grande cause nationale » 2025 par feu le gouvernement Barnier. Un choix favorablement accueilli dans un secteur en crise persistante, ou plusieurs voix ont surtout reclame des moyens suffisants.