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Tramadol, codeine: why France is delaying its new measures against opioids

December 15, 2024

Depuis des annees, l’Agence nationale de securite du medicament (ANSM) s’inquiete de la consommation de plus en plus importante d’opioides, un phenomene qui concerne des millions de Francais. Ces traitements sont des antidouleurs a l’action differente et, potentiellement, plus forte que les grands classiques comme le paracetamol ou l’aspirine. Mais ils presentent des risques de dependance et de surdosage, parfois mortels.

L’ANSM exprime regulierement son inquietude et, au fil des ans, a pris des mesures de plus en plus restrictives pour reduire leur consommation, avec comme contre-modele la catastrophique crise des opioides aux Etats-Unis, qui a cause des centaines de milliers de deces depuis les annees 1990.

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Selon l’ANSM, l’usage du tramadol a augmente de 68% entre 2006 et 2017

Les dernieres mesures en date devaient concerner deux opioides emblematiques : la codeine et le tramadol, dont la consommation s’est acceleree a partir de la fin des annees 2000. Selon l’une des dernieres etudes de reference de l’ANSM, l’usage du tramadol a augmente de 68% entre 2006 et 2017.

Les nouvelles mesures, dont la mise en place d’ordonnances infalsifiables, devaient entrer en vigueur debut decembre. Mais, au dernier moment, l’ANSM les a discretement reportees: elles sont desormais prevues pour debut mars. Pourquoi temporiser ? L’agence explique son choix par la necessite de « faciliter la transition vers ces nouvelles mesures pour les professionnels de sante et assurer aux patients l’acces a leur traitements ».

Car nombre de professionnels ont juge ces mesures precipitees. Pour certains, comme les pharmaciens, il s’agit de preoccupations pratiques: le temps necessaire, par exemple, pour acquerir les outils requis pour lire la version numerique des ordonnances infalsifiables. Mais, pour d’autres, les critiques portent plus sur le fond. C’est le cas de la Societe francaise d’etude et de traitement de la douleur (SEFTD) qui, fin novembre, a dit redouter que ces mesures conduisent a une « opiophobie » dommageable aux patients.

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Cette societe – qui rassemble medecins, pharmaciens et infirmiers – alertait « sur les risques associes a de potentielles interruptions de prescriptions antalgiques, dont les effets peuvent etre desastreux pour la prise en charge de la douleur ». Admettant les risques lies aux opioides, elle appelait a trouver « un equilibre delicat », jugeant excessifs les paralleles avec la situation americaine.

En 2022, la France a ainsi enregistre 14 deces lies au tramadol et six a la codeine, des situations dramatiques mais sans commune mesure avec les Etats-Unis, ou la consommation d’opioides a longtemps connu une absence criante de regles. Le report temporaire des mesures satisfait-elle la SFETD, qui demandait un « moratoire » ? Interrogee par l’AFP, la societe n’a pas repondu mais des specialistes de la douleur critiquent individuellement le principe de ces restrictions, retardees ou non.

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« La mise en place d’une ordonnance securisee me parait disproportionnee par rapport a la situation actuelle en France », juge aupres de l’AFP le rhumatologue Florian Bailly. « Il existe certes quelques cas d’abus de tramadol ou de codeine, mais les donnees (…) suggerent que leur nombre est limite. » Le debat reste toutefois ouvert car d’autres experts voient d’un bon oeil la fermete des autorites sanitaires. On les trouve moins chez les specialistes de la douleur que dans le monde de l’addictologie ou de la pharmacovigilance, discipline qui surveille les risques associes aux medicaments.

« Je peux comprendre la reticence qu’il peut y avoir sur la mise en place des ordonnances securisees, mais les experiences passees ont pour l’instant donne lieu a des retombees tres positives », estime aupres de l’AFP le pharmacologue Antoine Pariente. Les ordonnances securisees ont par exemple ete utilisees pour la pregabaline, un anti-douleur et anti-epileptique, sans provoquer de « catastrophe dans la prise en charge des patients », souligne-t-il, reconnaissant neanmoins que tramadol et codeine sont bien plus utilises.

L’expert n’est, en tout cas, pas convaincu par le fait de minimiser la situation francaise par rapport aux Etats-Unis. « L’argument est etrange », estime M. Pariente. « On ne doit pas attendre qu’un probleme prenne de l’ampleur pour agir dessus. »

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