Certains marqueurs de sante paraissent evidents, d’autres le sont moins. C’est le cas de la frequence des selles, indicateur de sante pouvant etre lie a la presence de maladies.
La diversite du microbiote en jeu
Un constat etait deja etabli, provenant de differentes etudes, dont l’une publiee dans la revue Nature En 2017:ne grande frequence de selles (soit plus de trois fois par jour) est liee a moins de diversite de microbiote dans l’intestin, une inflammation intestinale et donc une mauvaise sante.
Au contraire, une faible frequence de selles (moins de trois fois par semaine) est liee a une plus grande diversite du microbiote, des risques dus aux microbes venant des urines qui sont toxiques pour le foie ou les reins et un plus grand risque de maladies neurodegeneratives (telles la maladie de Parkinson, comme le demontre une etude publiee dans la revue Nature en 2021) et de maladie du rein.
Le lien entre constipation et maladie renale chronique (entrainant la diminution des capacites du rein a filtrer le sang) a, lui aussi, deja ete etabli dans une autre etude publiee en 2020 dans la revue OrganismsS, montrant que 71% des patients dyalises souffrant de cette maladie avaient aussi une constipation chronique.
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Une multitude de facteurs analyses
Dans cette nouvelle etude, les chercheurs de l’Institute for Systems Biology (Institut du Systeme Biologique) a Seattle (Etats-Unis) se sont interesses a l’influence que la frequence des selles pouvait avoir sur l’etat de sante des patients.
Ils ont utilise les donnees d’une start-up nommee « Arivale » (fermee depuis 2019) qui recueillait des analyses comme le microbiote intestinal ou encore des analyses sanguines pour des clients desirant ameliorer leur sante. Ils ont tenu a ne prendre des echantillons ne provenant que de personnes en bonne sante. Par exemple, les personnes ayant deja eu des cas de maladie du rein dans leur famille ou les personnes porteuses d’un syndrome de l’intestin irritable ont ete ecartees de l’experience.
Ce sont 3 955 personnes (agees de 19 a 89 ans, dont 65,1 % de femmes et 34,9 % d’hommes) qui ont repondu a un questionnaire sur leur hygiene de vie telle que leur regime alimentaire et leur style de vie. Ces reponses ont ete analysees avec les echantillons biologiques (comme le microbiote) de chaque personne.
Les volontaires ont du se situer parmi cette classification :
- Constipation (lorsque le nombre de selles etait egal ou inferieur a deux par semaines),
- Normal (entre trois et six par semaine),
- Superieur a la normale (entre un et trois par jour),
- Diarrhee (quatre ou plus par jour).
En analysant le microbiote grace a la technique de sequencage de l’ARN 16s des bacteries (lire l’encadre ci-dessous), sur les 135 genres de bacteries trouvees, 59 etaient associees a la frequence des selles.
L’ARN 16s est un ARN tres conserve au fil du temps et present chez tous les microorganismes. Il est souvent utilise pour etablir des liens de phylogenie (liens de parente).
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Des variations de frequence de selles selon le genre et l’age
Le constat a valide le lien entre diversite du microbiote et constipation. De plus, certains taxons – echelle de classification phylogenique – etaient plus presents chez les personnes constipees comme le Ruminiclostridium 9.
Une autre donnee interessante montre un regime alimentaire different entre les genres. Les femmes ont tendance en effet a manger plus de legumes et de fruits, mais contrairement a ce que l’on pourrait s’attendre avec un regime riche en fibres, elles ont aussi plus un risque de constipation et de maladies renales. Les hommes sont davantage sur une moyenne elevee de frequence de selles (voire diarrhee).
La consommation de fruits et legumes semble importante pour notre intestin, mais pas seulement : les personnes avec un taux de cholesterol sain (lire l’encadre ci-dessous) ainsi qu’une inflammation intestinale faible (reaction du systeme immunitaire au niveau de la paroi intestinale pouvant provoquer des douleurs ou problemes digestifs) ont ce regime alimentaire.
Une autre difference entre les individus interroges montre que la diarrhee et la haute frequence de selles sont plus associees a un jeune age (inferieur a 40 ans).
Le est un lipide qui constitue la matiere grasse des etres vivants. Le taux de lipides dans le sang varie en fonction de chaque individu. Un taux « normal » est souvent inferieur a 2 g/L.
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La sante mentale influence aussi nos selles
L’etude indique aussi que les personnes reportant des cas de depression ou d’anxiete au sein de leur famille sont plus sujettes a la diarrhee. Cela suggere que les maladies mentales des proches pourraient influencer le bon fonctionnement du transit.
Pour finir, un enrichissement de toxines uremiques (dechets non elimines par les reins s’accumulant dans les tissus) de patients a frequence basse de selles a ete constate. Ces toxines ont ete, par d’autres etudes, associees a une progression de maladies renales (par exemple dans une etude publiee dans la revue Kidney International Reports en 2019) ou de maladies neurodegeneratives (publiee dans la revue Plos One (En 2019)
Cette etude montre que notre etat de sante peut influencer notre frequence de selles, utilisable comme capteur de la sante globale. Cependant, l’etude s’autocritique sur l’echantillon des personnes analysees. En effet, la majorite des analyses ont ete effectuees sur des personnes se definissant comme blanches et de genre feminin, un echantillon non representatif de l’ensemble de la population.