Troubles de l’attention, hyperactivite, impulsivite… Diagnostiquer les enfants et adolescents souffrant de TDAH le plus tot possible est essentiel, juge la Haute autorite de sante qui publie lundi une liste de recommandations pour ameliorer leur prise en charge, aujourd’hui inegale.
« Plusieurs maitresses trouvaient qu’il n’ecoutait rien a l’ecole; a la maison, il etait extremement turbulent ». Camille Therond, dont le fils est aujourd’hui age de 14 ans, a consulte un grand nombre de specialistes – ORL, psychologue, pediatre, orthophoniste, psychologue – avant qu’un psychiatre ne mette finalement le nom de « TDAH » (trouble deficit de l’attention avec ou sans hyperactivite) sur ses problemes de comportement.
Un parcours long: « on a erre de la moyenne section jusqu’au CE2 », resume-t-elle.
Pendant longtemps, ce trouble a ete une « realite souvent niee », expose Christine Getin, directrice de l’association HyperSupers – TDAH France, qui a saisi la HAS avec le ministere de la Sante pour faire avancer le sujet.
« Ils etaient vus comme des enfants agites et pas tres bien eleves. Le probleme venait soi-disant de leur education avec une grande culpabilite mise sur les meres, comme s’il n’y avait pas de realite scientifique derriere ces troubles », poursuit-elle.
Classes dans la categorie des troubles du neurodeveloppement, leur prevalence est estimee chez l’enfant autour de 5% dans le monde.
– Entretien –
« Quand un trouble est a ce point frequent, on ne peut pas reserver le diagnostic et la prise en charge a un tout petit nombre de specialistes », estime Olivier Bonnot, professeur de psychiatrie de l’enfant et l’adolescent a l’universite Paris Saclay, qui a preside le groupe de travail de la HAS.
En 2015, la Haute autorite de sante avait pour la premiere fois formule des recommandations pour mieux les reperer.
Pres de dix ans plus tard, elle va plus loin en expliquant comment poser un diagnostic. Celui-ci doit reposer selon elle sur un entretien avec l’enfant et ses parents afin d’evaluer le developpement de l’enfant dans toutes ses dimensions (neurologique, psychomotrice, affective etc…)
Il doit egalement comprendre un examen clinique et un recueil d’informations aupres de son entourage (familial, scolaire…).
« Ce qui fait la subtilite du diagnostic, c’est que de nombreux enfants peuvent avoir l’air impulsifs ou presenter des troubles de l’attention », rappelle Olivier Bonnot.
« Cette fois, on dispose enfin d’une procedure claire pour etablir un diagnostic medical cadre et qui sera grave dans le marbre », se felicite Christine Getin.
La Haute autorite de sante va plus loin en edictant des recommandations pour le traitement.
En premiere intention, des interventions « non medicamenteuses » sont preconisees, telles que la psychoeducation qui consiste a delivrer des informations sur le TDAH, ses impacts et comment fonctionner avec ce trouble.
– Ritaline
« La reconnaissance et la comprehension des difficultes presentees par l’enfant ont un retentissement positif sur sa qualite de vie et ses relations intrafamiliales », ecrit-elle.
En complement, si besoin et selon la gravite du trouble, un traitement medicamenteux peut etre prescrit, recommande la HAS.
La seule molecule disponible en France concernant le traitement du TDAH chez l’enfant a partir de 6 ans et l’adolescent est le methylphenidate, plus connu commercialement sous le nom de ritaline.
Actuellement, seuls les pediatres, psychiatres et neurologues pour enfants sont autorises a initier un tel traitement.
En France, « les professionnels prenant en charge les enfants presentant un TDAH sont encore peu nombreux et repartis inegalement sur le territoire », regrette la HAS, ce qui entraine un allongement du delai de diagnostic et d’intervention.
Dans l’objectif d’elargir l’offre de soins, la HAS appelle les pouvoirs publics a etendre ces competences a d’autres medecins (generalistes notamment) en mettant en place une formation structuree et diplomante.
« Aujourd’hui, les delais sont tellement longs pour obtenir un rendez-vous avec un psy que des parents, desarmes, depensent souvent des sommes astronomiques pour faire des bilans en tout genre qui ne sont pas forcement utiles », alerte Christine Getin.
« Le delai moyen avant le bon diagnostic est estime actuellement entre 3 et 6 ans », rappelle Olivier Bonnot. Or a hauteur d’enfant « six mois, c’est presque une annee scolaire ».