Cet article est issu du magazine Les Dossiers de Sciences et Avenir n°220 daté janvier/ mars 2025.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé, 14 % des personnes de plus de 60 ans souffrent d’un trouble psychique, les plus fréquents étant la dépression et l’anxiété, souvent sous-diagnostiquées. Autre chiffre qui en dit long : un quart des suicides dans le monde concerne des seniors.
Une des causes de ces troubles est l’isolement social, dont le risque augmente avec l’âge : « Vos enfants ont déménagé, vos amis ne sont plus là, vous n’avez plus de travail, donc de collègues, le handicap et les maladies vous empêchent de sortir… », énumère Kathryn Braun, gérontologue à l’université de Hawaï, spécialiste de l’isolement.
Cet isolement rend aussi plus difficile de repérer les épisodes dépressifs. Plusieurs symptômes peuvent être des indices : un état d’abattement, une diminution de l’estime de soi, un sentiment de culpabilité ou d’inutilité, ainsi que des troubles du sommeil, une fatigue durable, ou encore la perte d’appétit. La dépression prend parfois des formes masquées, telles qu’une absence de tristesse, de l’irritabilité ou des conduites régressives.
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Acquérir de nouvelles compétences
Un traitement anti-dépresseur peut être indiqué, mais les approches non médicamenteuses doivent être systématiquement envisagées. « On perd beaucoup de choses en vieillissant, poursuit Kathryn Braun. L’astuce est de compenser ces pertes : au lieu de vous occuper de vos enfants, vous pouvez prendre soin d’autres personnes, vous faire de nouveaux amis, remplacer le travail par une autre activité… C’est un défi, mais loin d’être hors d’atteinte. »
En 2024, la gérontologue a publié dans Frontiers in Public Health un article dans lequel elle passe en revue les meilleures manières de lutter contre la solitude dans cette tranche d’âge. Elle montre par exemple que les activités sociales sont d’autant plus bénéfiques qu’elles ne visent pas seulement à briser la solitude. Acquérir de nouvelles compétences en compagnie d’autres personnes partageant les mêmes centres d’intérêt, comme le jardinage, fait partie des pratiques les plus efficaces.
Dans certains cas, il peut être nécessaire de recourir à l’aide d’un psychologue, car les personnes isolées ont tendance à se méfier des autres, ce qui les pousse à… s’isoler davantage. Les thérapies comportementales et cognitives (TCC) sont utiles pour lever ces barrières. Il est aussi possible d’emménager dans des résidences pour seniors ou en colocation. Des options d’habitat partagé pour seniors se multiplient en France, avec ou sans auxiliaires de vie. « La solitude n’est pas une fatalité », conclut avec optimisme Kathryn Braun.