Depuis le début de l’année à La Réunion, six décès liés au chikungunya ont été recensés selon les autorités sanitaires. Tandis qu’une amorce de baisse de l’épidémie sur l’île se dessine, plus de 100.000 personnes pourraient avoir été infectées. Plus de 33.000 cas ont été confirmés depuis le début de l’année. Mais le nombre réel est considéré comme bien plus élevé, beaucoup de malades ne se faisant pas dépister. Avec 900.000 habitants sur l’île de l’océan Indien, plus d’une personne sur neuf a donc déjà été contaminée. Parmi elles, 40% vont développer une forme chronique, selon l’Institut Pasteur.
Le chikungunya se caractérise par une fièvre d’apparition brutale, souvent accompagnée de douleurs articulaires sévères. « Ces douleurs articulaires, qui sont souvent très handicapantes, durent généralement quelques jours, mais peuvent persister pendant des semaines, des mois ou même des années. Les autres symptômes possibles comprennent une tuméfaction des articulations, des douleurs musculaires, des céphalées, des nausées, de la fatigue et des éruptions cutanées », rappelle l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Les femmes plus touchées que les hommes
Dès lors que les signes cliniques perdurent au-delà de 3 mois, la maladie est considérée comme chronique. Les signes cliniques ressemblent alors très fortement à une polyarthrite rhumatoïde, une maladie inflammatoire chronique des articulations évoluant par poussées. Là aussi, les patients présentent une arthralgie, une douleur articulaire. Elle peut s’accompagner d’une inflammation et se transformer en arthrite. L’articulation peut devenir chaude, rouge et gonflée.
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« Plusieurs facteurs de risque entrent en compte : l’âge, avoir plus de 40 ans, être une femme, avoir fait une forme clinique grave lors du pic avec beaucoup d’arthralgie ou d’arthrite au niveau des articulations ainsi qu’une charge virale élevée lors de l’infection« , explique le Pr Olivier Schwartz, qui dirige l’unité Virus et Immunité de l’Institut Pasteur.
Comme souvent dans les maladies auto-immunes, les femmes sont plus touchées que les hommes. Et ce, pour des raisons à la fois hormonales et génétiques. « On sait que les œstrogènes peuvent jouer un rôle facilitant dans l’apparition de ces maladies. On sait aussi que certains récepteurs de l’immunité innée (les réactions de défense de l’organisme pour empêcher la pénétration d’agents infectieux, ndlr), comme TLR7, qui activent la réponse inflammatoire du système immunitaire, sont plus exprimés chez les femmes. Certains gènes qui contrôlent leur expression sont présents sur le chromosome X, or les femmes en possèdent deux copies, ce qui augmente la quantité de ces récepteurs.«
Plusieurs traitements existent contre le chikungunya
Plusieurs traitements existent, comme le Métotrexate, utilisé dans le traitement de certains cancers et dans les maladies auto-immunes, ou les anti-TNF, aussi utilisés contre la polyarthrite rhumatoïde. En parallèle, la kinésithérapie doit aider à garder sa mobilité.
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Lors de l’épidémie de 2005, aucun vaccin ni traitement spécifique n’était disponible. Cette fois, le vaccin Ixchiq du groupe pharmaceutique Valneva a obtenu son autorisation de mise sur le marché en Europe. Il est destiné en priorité aux personnes âgées de plus de 65 ans et celles souffrant de comorbidités, qui peuvent bénéficier d’une vaccination gratuite. En tout, 90.000 doses doivent être allouées à l’île, dont 40.000 ont déjà été livrées. La campagne de vaccination, lancée le 7 avril 2025 par le ministre des Outre-mer Manuel Valls, démarre toutefois tardivement.
L’épidémie ayant déjà beaucoup progressé, « la campagne de vaccination actuelle ne jouera pas le rôle d’arrêt de transmission » mais « va éviter des cas graves« , a estimé auprès de l’AFP Patrick Mavingui, directeur de recherche CNRS. Avant cette épidémie, déclenchée en août 2024 mais qui a explosé en 2025, aucun cas de chikungunya n’avait été signalé à La Réunion depuis 2010.