La Cour supreme indienne a ordonne mardi la creation d’un groupe de travail pour renforcer la securite du personnel soignant apres le viol et le meurtre d’une jeune medecin a Calcutta.
Le president de la Cour, Dhananjaya Chandrachud, a precise que cette nouvelle instance, composee de medecins, devra preparer un plan de prevention de la violence dans les etablissements de sante et un « protocole » pour etablir des conditions de travail securisees.
La decouverte du corps ensanglante d’une doctoresse de 31 ans dans un hopital public, le 9 aout, a ravive la colere face au fleau de la violence contre les femmes.
Apres le meurtre, les associations de medecins des etablissements hospitaliers publics indiens ont manifeste et entame des mouvements de greve qui ont conduit a l’arret des soins non essentiels dans de nombreuses villes.
Ces arrets de travail frappent les patients qui cherchent a se faire soigner gratuitement dans le secteur public, trop pauvres pour s’offrir des soins dans le prive.
– Files d’attente –
A New Delhi, les files d’attente s’allongent dans les hopitaux. Khatoon, 65 ans, attend depuis dix jours un rendez-vous dans un etablissement public de la capitale pour son fils de 30 ans, atteint d’une tumeur au cerveau et alite depuis quatre ans. « Son etat n’est pas bon du tout », dit-elle a l’AFP, lui jetant un regard inquiet.
« Je ne sais pas si cette greve est pour le meilleur ou pour le pire. Tout ce que je crains, c’est que mon fils ne meure avant la date (du rendez-vous) ».
Rosy Khatoon, 35 ans, assise a cote de son mari, qui porte une poche de colostomie car il souffre d’un cancer de l’estomac, juge « injuste » ce debrayage. « Des gens meurent. « Comment cela peut-il continuer avec autant de patients qui souffrent ? « , s’insurge-t-elle.
Les manifestants, qui ont surnomme l' »Abhaya » (l' »Intrepide ») la medecin assassinee, ont defile mardi a Calcutta pour exiger que « justice soit faite », tandis que les juges de la Cour supreme ont declare dans leur arret : « la brutalite de l’agression sexuelle et la nature du crime ont choque la conscience de la nation ».
Cette juridiction siegeant a New Delhi s’est dite contrainte d’intervenir car « l’absence de normes de securite dans les etablissements de sante face a la violence a l’encontre du personnel constitue une grave preoccupation ».
– « Ne pas attendre un autre viol » –
« Avec peu ou pas de systemes de protection pour assurer leur securite, les professionnels de sante sont devenus vulnerables a la violence », a ajoute la Cour qui releve notamment le manque de cameras de videosurveillance et de personnel de securite dans les unites de soins medicaux.
La medecin tuee a Calcutta a ete retrouvee dans la salle de seminaire de l’hopital, ce qui laisse a penser qu’elle s’y etait rendue pour s’y reposer au cours d’une garde de 36 heures. Ses parents soupconnent qu’elle a ete victime d’un viol collectif.
« A un moment ou de plus en plus de femmes rejoignent le marche du travail dans des domaines de pointe du savoir et de la science, la nation a un interet vital a garantir des conditions de travail sures et dignes », a insiste le tribunal.
« La nation ne peut pas attendre un viol ou un meurtre pour obtenir de reels changements sur le terrain », a-t-il martele.
Un homme, qui travaillait a l’accueil de l’hopital a ete arrete.
– « Violence » –
Cette nouvelle agression a reveille le souvenir du viol collectif et du meurtre dont avait ete victime une jeune femme dans un autobus en 2012 a New Delhi.
Les violences sexuelles a l’encontre des femmes sont tres repandues en Inde, avec en moyenne pres de 90 viols par jour signales en 2022 dans ce pays de 1,4 milliard d’habitants. Et les conditions de travail dans certains hopitaux sont desastreuses.
La Cour supreme a mis en avant des journees de travail ereintantes de 36 heures ou « meme les besoins fondamentaux en matiere d’assainissement, de nutrition, d’hygiene et de repos ne sont pas satisfaits ».
Il est egalement courant en Inde que des proches accusent le personnel de sante de negligence lorsqu’un patient meurt, la Cour notant que de telles allegations sont souvent « immediatement suivies de violences ».
Cette juridiction a cite le cas d’une infirmiere dans l’Etat du Bihar qui a ete poussee du premier etage d’un hopital en mai par la famille d’une patiente enceinte qui avait perdu la vie.
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