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« Je ne suis pas un empoisonneur », clame une dernière fois Frédéric Péchier

décembre 16, 2025

« Je ne suis pas un empoisonneur », a une dernière fois clamé lundi Frédéric Péchier, anesthésiste de Besançon qui encourt la réclusion à perpétuité, avant que la cour d’assises du Doubs ne se retire pour délibérer au terme de trois mois et demi d’un procès éprouvant.

« Ca fait huit ans que je me bats contre le fait qu’on me présente comme un empoisonneur », mais « non, je ne suis pas un empoisonneur », a déclaré le médecin de 53 ans.

Accusé d’avoir empoisonné 30 patients dont 12 sont morts, entre 2008 et 2017, le quinquagénaire assure avoir « toujours respecté » le serment d’Hippocrate.

La cour devra en décider.

Après 15 semaines d’audience, elle se retire « dans un lieu tenu secret » pour délibérer, a déclaré la présidente Delphine Thibierge en clôture des débats. Le verdict est attendu d’ici à vendredi.

Quant à Frédéric Péchier, qui a comparu libre depuis le 8 septembre, il a quitté le palais de justice escorté par les forces de l’ordre. Il devra « rester à la disposition de la justice » et ne pourra pas quitter le logement qu’il occupe à Besançon, a précisé la magistrate.

La semaine dernière, au terme d’un réquisitoire intense, les deux avocates générales ont requis la réclusion à perpétuité, assortie d’une période de sûreté maximale de 22 ans, à l’encontre de ce « tueur en série » aux crimes « hautement pervers ».

– « Fabriquer un coupable » –

Mais pour condamner le médecin, « il faut des preuves », a martelé son avocat, Randall Schwerdorffer. Or, dans ce dossier, « c’est le néant de la preuve », selon lui.

Me Schwerdorffer a établi un parallèle entre Frédéric Péchier et Patrick Dils, qui a passé 15 ans en détention pour les meurtres de deux enfants commis en 1986 près de Metz, avant d’être acquitté en appel.

Dans les deux cas, « il fallait que ça aille vite » pour trouver un coupable, a-t-il retracé. Dès le début de l’enquête en mars 2017, les enquêteurs ont été « convaincus de la culpabilité de Frédéric Péchier » et se sont efforcés de la « démontrer ».

« Jamais on ne cherchera ailleurs », a-t-il fustigé. « On a fabriqué un coupable » et « toute la communauté médicale » s’est liguée contre lui. Dès lors, son sort était « scellé », selon lui.

Une comparaison « particulièrement malhonnête et déplacée », a jugé Frédéric Berna, avocat de nombreuses parties civiles.

Randall Schwerdorffer, l'avocat de Frédéric Péchier, le 15 décembre 2025 à Besançon (AFP - ARNAUD FINISTRE)
Randall Schwerdorffer, l’avocat de Frédéric Péchier, le 15 décembre 2025 à Besançon (AFP – ARNAUD FINISTRE)

« On ne peut pas comparer Patrick Dils, qui avait 16 ans à l’époque, qui était assez peu lettré, qui était un garçon très fragile, et qui de surcroît a avoué, avec le Dr Péchier, qui est un homme supérieurement intelligent, qui a 45 ans à l’époque et qui n’a jamais rien avoué ».

Pour Me Schwerdorffer, « rien d’hallucinant dans la vie » de son client « ne permet de dire qu’il est dingue », alors que pour « tuer à répétition de cette façon là, il faut une telle rage, une telle violence ».

– « Coïncidences » –

Mais « quoi qu’il dise, quoi qu’il fasse, il sera toujours critiqué », regrette le pénaliste, et « comme Patrick Dils était devenu +le tueur d’enfants, le monstre+, Frédéric Péchier est devenu +l’empoisonneur, le monstre+ ».

L'avocat Frédéric Berna, avocats de parties civiles au procès de Frédéric Péchier, le 15 décembre 2025 à Besançon (AFP - ARNAUD FINISTRE)
L’avocat Frédéric Berna, avocats de parties civiles au procès de Frédéric Péchier, le 15 décembre 2025 à Besançon (AFP – ARNAUD FINISTRE)

Certes, « il y a bien un empoisonneur à la clinique Saint-Vincent » mais ce n’est pas Frédéric Péchier, a soutenu la défense, appelant les six jurés populaires et les trois magistrats professionnels à l' »impartialité ».

Dans ce dossier, « on a fait avec des coïncidences une règle de preuve, mais ce ne sont que des coïncidences », a estimé Me Schwerdorffer après l’audience.

« On a expliqué aux jurés que les coïncidences n’existaient pas et que le hasard n’existait pas », mais « allez expliquer ça à monsieur Dils – qui s’est trouvé par hasard près du lieu du crime de Francis Heaulme – que le hasard n’existe pas », a-t-il ajouté.

Selon les avocates générales, Frédéric Péchier a pollué des poches de perfusion utilisées pendant les interventions pour déclencher des arrêts cardiaques incompréhensibles pour les soignants.

L’ancien anesthésiste, « l’un des plus grands criminels de l’histoire judiciaire française » selon l’accusation, cherchait ainsi à nuire aux collègues avec qui il était en conflit et « nourrir sa soif de puissance ».

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