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Les « polluants éternels » dans l’eau potable sont-ils responsables d’une hausse des cancers ?

janvier 16, 2025

Chaque année, aux Etats-Unis, un peu plus de 6800 cancers seraient causés par la présence de PFAS (lire l’encadré ci-dessous) dans l’eau potable. C’est ce que révèle une étude de la Keck School of Medicine de Los Angeles (Etats-Unis), parue dans le Journal of Exposure Science & Environmental Epidemiology. Ainsi, selon ces travaux, les personnes exposées aux PFAS dans leur eau du robinet ont jusqu’à 33% de risques supplémentaires de développer certains types de cancers.

Dans cette étude, les scientifiques se sont penchés sur les régions des Etats-Unis où les taux maximaux de PFAS présents dans les systèmes publics d’eau potable étaient supérieurs aux recommandations de l’Agence Américaine de Protection de l’Environnement (EPA), de 2013 à 2015 et de 2023 à 2024, notamment aux alentours de New York ou de Chicago par exemple. Les chercheurs ont comparé ces résultats avec les données d’incidence du cancer de 2016 à 2021 du programme américain Surveillance, Epidemiology, and End Results.

Qu’est-ce que les PFAS ?

Les PFAS ou les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (aussi appelées « polluants éternels ») sont des produits chimiques utilisés dans de nombreux procédés et produits industriels tels que les poêles à frire, les récipients alimentaires ou encore l’eau du robinet. Ils sont très résistants à la dégradation et peuvent donc persister jusqu’à plusieurs siècles dans l’environnement.

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Jusqu’à 33% de risques en plus de développer un cancer

Ainsi, en contrôlant les facteurs extérieurs tels que l’âge, le sexe, le tabagisme, l’obésité ou encore la présence d’autres polluants, ils se sont aperçus que, dans les régions où les taux de PFAS dans l’eau potable dépassaient les recommandations de 0,004 microgramme par litre (μg/L), selon le polluant, les habitants présentaient de 2 à 33% de risques supplémentaires de développer certains types de cancers, par rapport au reste de la population.

En effet, les cancers de la cavité buccale, du pharynx, des poumons, du système digestif, du cerveau ou encore du système urinaire et de la thyroïde sont associés ici à la présence de PFAS en grande quantité, pouvant aller de 0.002 à 0.020 microgramme par litre (μg/L) de PFAS dans le système public d’eau potable.

Illustration de la distribution des PFAS dans l’eau potable et de l’incidence annuelle moyenne du cancer entre 2016 et 2021.

Illustration de la distribution des PFAS dans l’eau potable et de l’incidence annuelle moyenne du cancer entre 2016 et 2021. Crédits : Journal of Exposure Science & Environmental Epidemiology

De plus, selon une étude de l’Institut d’études géologiques des Etats-Unis parue en 2023, environ 45% des eaux potables des Etats-Unis contiennent au moins un « polluant éternel ». C’est-à-dire que près de la moitié des Américains seraient contaminés aux PFAS via leur eau du robinet. En plus des autres expositions à ces polluants, sur des emballages alimentaires, des ustensiles antiadhésifs ou encore via certains produits cosmétiques, les PFAS sont présents presque partout dans le pays. Augmentant considérablement les risques pour la santé, notamment de développer des cancers.

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Il est nécessaire d’augmenter la surveillance des PFAS

Cette étude apporte une nouvelle preuve dans la bataille menée contre l’utilisation des PFAS et la nécessité d’augmenter la surveillance de ces produits, aussi néfastes pour l’environnement que pour l’humain. Ainsi, dès 2029, l’EPA devrait contrôler, aux Etats-Unis, les niveaux de six différents PFAS dans l’eau potable afin d’éviter que la population n’y soit trop contaminée.

Que dit la loi en France ?

En France, afin de respecter les limites européennes fixées pour 2026, la présence de 20 PFAS dans l’eau destinée à la consommation humaine est réglementée depuis janvier 2023 et limitée à 0,1 microgramme par litre (μg/L) pour l’eau du robinet et à 0,2 microgramme par litre (μg/L) pour l’eau avant traitement selon le ministère de la Santé.

D’après le chercheur Shiwen Li, auteur de l’étude, « ces résultats nous permettent de tirer une première conclusion sur le lien entre certains cancers rares et les PFAS », incitant ainsi à « rechercher chacun de ces liens d’une manière plus individualisée et plus précise », afin de comprendre comment les “polluants éternels” impactent l’organisme et entraînent le développement d’un cancer. En effet, « certains PFAS, ayant été moins étudiés, doivent être davantage surveillés et d’autres, qui ne sont peut-être pas encore strictement réglementés, doivent l’être », d’après le chercheur.

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