nouvelle-avancee-dans-la-lutte-contre-l’hepatite-e

Nouvelle avancée dans la lutte contre l’hépatite E

février 5, 2025

Seulement deux doses de vaccin suffiraient pour combattre l’hépatite virale E (HVE). C’est ce qu’avance une étude réalisée par Médecins sans frontières (MSF) et l’Université de Genève (Suisse), dans la revue The Lancet Infectious Diseases. Le vaccin Hecolin, créé et autorisé depuis 2011 en Chine pour lutter contre l’hépatite E, comporte normalement un schéma vaccinal à trois injections, à 0, 1 et 6 mois. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande son utilisation depuis 2015 lors de grande vague d’HVE.

« Les vagues d’hépatite E peuvent parfois perdurer pendant des années en raison des conditions de vie difficiles de ces habitants », explique auprès de Sciences et Avenir Iza Ciglenecki, coordinatrice de la recherche opérationnelle à MSF Suisse. Son étude a été réalisée à Bentiu, au Soudan du Sud, un camp de personnes déplacées, en raison de la guerre civile faisant rage dans le pays depuis 2013. Dans ce lieu, l’accès à l’hygiène ou encore la mise en place d’un assainissement de l’eau sont compromis.

De plus, de nombreuses inondations, comme en 2021, rendent encore plus difficiles l’accès à une eau propre. Injecter trois doses de vaccin est donc, en pratique, beaucoup plus compliqué à mettre en place que ce qu’il n’y paraît, « notamment en raison des nombreux déplacements des populations ainsi qu’à cause du délai entre la deuxième et la troisième dose qui est de quatre mois », ajoute Iza Ciglenecki.

Qu’est-ce que l’hépatite E ?

L’hépatite E (ou HEV) est une maladie infectieuse du foie, due à un virus, se transmettant via les eaux ou la nourriture contaminées via les selles de personnes infectées. D’après l’OMS, environ 50.000 personnes en mouraient chaque année à travers le monde. En tout, il existe quatre génotypes différents d’hépatite E. Selon le ministère de la Santé, les génotypes 1 et 2 sont plus fréquents en Asie, au Moyen-Orient, en Afrique, ou encore en Inde. Le génotype 3, lui, est responsable d’environ 200 à 300 en cas par an en France et dans d’autres pays industrialisés. L’hépatite E se caractérise par divers symptômes : fièvre, jaunisse, nausées, vomissements, douleurs abdominales, etc.

Lire aussi : Niger : la « mauvaise » qualité de l’eau, cause de l’hépatite E dans les camps de réfugiés

Deux doses suffisent pour obtenir 89,4% de protection

Iza Ciglenecki et ses collègues ont donc voulu savoir si seulement deux doses pourraient suffire à protéger les populations les plus vulnérables contre ce virus infectieux. Ainsi, sur les 100.000 personnes environ présentes sur le camp, MSF a mené une campagne vaccinale sur 26.846 personnes (âgées entre 16 et 40 ans). En tout, 86% d’entre elles ont reçu au moins une dose de vaccin, 73% en ont eu deux et seulement 58% ont pu accéder à trois injections d’Hecolin. Ces chiffres montrent la difficulté de vacciner trois fois les mêmes personnes, et qu’il est plus simple de ne leur injecter que deux doses, surtout si elles sont aussi efficaces que trois. D’après Iza Ciglenecki, « la population locale a accepté de se faire vacciner plus facilement qu’on ne l’aurait pensé, en effet l’hépatite E est une maladie tellement répandue que tout le monde là-bas connaît au moins une personne ayant déjà été sévèrement touchée ou décédée à cause de l’hépatite E ».

Suite à cette campagne de vaccination, « la première à être faite en plein durant une épidémie d’hépatite E », les membres de Médecins sans frontières ont constaté que seulement deux doses suffisaient à protéger les personnes vaccinées à hauteur de 89,4%, contre 100% pour trois. Pourtant, bien que la protection soit quelque peu réduite, notamment sur le long terme, un schéma vaccinal à deux doses reste tout de même une bonne solution lors de situations de crise, « avec une efficacité de protection d’au moins six mois (temps de l’étude, ndlr)« .

Lire aussi : La Ribavirine, un traitement contre l’hépatite E

Le vaccin à deux doses protège même à 89,9%, 10 ans après

Cependant, une question reste en suspens : deux doses d’Hecolin suffisent-elles à protéger les patients sur le long terme ? Pour répondre à cette interrogation, lors d’essais cliniques menés en Chine, pour tester le vaccin Hecolin, les chercheurs se sont penchés sur l’efficacité du vaccin à deux et à trois doses, à 30 mois après l’injection et 10 ans après. Ces recherches ont montré qu’un schéma classique à trois doses fait toujours preuve d’une efficacité de 100% plusieurs mois et même 10 ans après. Bien que deux injections soient moins efficaces, elles protègent tout de même à hauteur de 89,9% les patients à 30 mois et 10 ans après le vaccin. De plus, selon la coordinatrice de la recherche opérationnelle à MSF Suisse, « le fait d’avoir déjà été exposé au virus permet au vaccin d’agir comme un booster d’immunité, le rendant encore plus efficace lors d’une vague d’hépatite E, notamment à Bentiu ».

« Notre étude a révélé que deux doses de vaccin étaient efficaces, un excellent résultat compte tenu du contexte particulier d’un camp de personnes déplacées », conclut Iza Ciglenecki. Démontrant donc qu’en cas de situation de crise, deux doses sont une bonne solution d’adaptation au terrain réel, pour préserver les populations, à court comme à plus long terme.

fr_FRFrench