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Ozempic : des effets bénéfiques sur la dépendance à l’alcool

février 21, 2025

Amélioration de la santé cardiovasculaire et des symptômes dépressifs, effet protecteur sur le cerveau, atout contre les insuffisances rénales et même contre le VIH… En septembre 2024, Sciences et Avenir a fait un état des lieux de la recherche prolifique sur les analogues de GLP-1. Aujourd’hui indiqués dans le diabète et certains cas d’obésité, ces molécules pourraient voir leur éventail de prescription s’élargir. Si l’amélioration de la santé vasculaire est la piste la plus solide, d’autres effets continuent d’être explorés et se confirment progressivement. Récemment, c’est le cas des bénéfices sur la dépendance à l’alcool. A titre indicatif, on estime que l’alcool est à l’origine de 49.000 décès par an en France.

Dès les études précliniques des années 2010, les scientifiques constatent que GLP-1 peut désamorcer les comportements addictifs. Mais jusqu’à présent, les travaux sur l’être humain étaient rétrospectifs : les chercheurs examinent le dossier des patients auxquels on a prescrit des analogues de GLP-1 pour traiter un diabète par exemple, et observent l’évolution d’un comportement, tel que l’addiction. “Cette fois-ci, les scientifiques de l’Université de Californie du Sud font un pas en avant avec un essai contrôlé randomisé,” indique Nicolas Marie, chercheur au CNRS. L’objet de l’étude est la dépendance à l’alcool, et la molécule a été administrée pour analyser ses effets sur ce comportement et non sur l’obésité ou le diabète. En d’autres termes, l’addiction est observée en elle-même et pas en tant qu’effet secondaire. Leurs résultats ont été publiés dans la revue JAMA Psychiatry.

Une diminution du « craving » et de la consommation d’alcool

Le sémaglutide avait fait l’objet d’une étude rétrospective d’ampleur en mai 2024. Elle explorait justement les effets de cette molécule sur la dépendance à l’alcool. L’analyse des dossiers médicaux de 80.000 personnes obèses avait révélé une diminution de moitié de leur consommation. Cette fois-ci, des chercheurs ont réuni une petite cohorte d’une cinquantaine d’adultes souffrant de troubles modérés liés à la consommation d’alcool et qui ne recherchaient pas activement de traitement.

« Au cours du mois précédent, les participants avaient consommé plus de 7 verres par semaine pour les femmes, et plus de 14 pour les hommes. Ils avaient aussi vécu deux épisodes ou plus de forte consommation d’alcool (plus de 4 ou 5 verres en fonction du sexe) », précisent les auteurs de l’étude. Ils ont ensuite été répartis en deux groupes, certains ont reçu des injections hebdomadaires d’une dose standard d’Ozempic, pour les autres, il s’agissait d’un placebo.

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Après neuf semaines, les chercheurs ont renseigné leur consommation d’alcool en mesurant notamment la concentration d’alcool dans l’haleine. « Résultat : le sémaglutide a réduit de manière significative la consommation des participants ainsi les « cravings » d’alcool, c’est-à-dire les envies irrépressibles », rapporte Nicolas Marie. Entre autres, près de 40 % des personnes traitées par Ozempic n’ont signalé aucun jour de forte consommation d’alcool au cours du dernier mois de traitement, contre 20 % dans le groupe placebo.

GLP-1 agit directement sur le système de récompense

“Il existe encore peu de solutions pour traiter la dépendance à l’alcool, et ces travaux confirment la tendance observée lors des études rétrospectives : le sémaglutide pourrait s’ajouter à l’arsenal thérapeutique de cette addiction si de nouvelles études continuent d’appuyer ces résultats », se réjouit Nicolas Marie. Si cette molécule peut avoir un effet sur les addictions, c’est que GLP-1 agit largement dans le cerveau, en particulier sur le circuit de la récompense. « Il y a des récepteurs du GLP-1 un peu partout dans le corps et notamment dans le noyau accumbens qui est à l’origine de l’état de satisfaction de l’individu », souligne le chercheur. GLP-1 inhibe ainsi la compulsion et la recherche de récompense. D’après les auteurs de l’étude, le sémaglutide serait au moins aussi efficace que la naltrexone, actuellement prescrit pour lutter contre la dépendance à l’alcool.

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Pour Nicolas Marie, le sémaglutide ne s’apprête pas à révolutionner la prise en charge de la dépendance à l’alcool, mais viendrait s’ajouter aux options thérapeutiques encore limitées. « Les troubles addictifs sont difficiles à soigner car l’efficacité des traitements varie largement d’un individu à l’autre. Mais si ces résultats se confirment au travers d’une étude sur une cohorte plus large et plus diversifiée, les analogues de GLP-1 ouvriront une nouvelle voie, augmentant ainsi les chances de trouver un traitement adapté chez ces patients », conclut-il.

D’autant plus que cette dernière étude montre des bénéfices avec une posologie classique. Les chercheurs ajoutent que les fumeurs qui faisaient partie du groupe Ozempic ont aussi diminué leur consommation de cigarettes. De nouvelles études sont attendues pour continuer d’explorer les effets de ces molécules sur les addictions et la dépression notamment.

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