Il pourrait s’agir d’une percee capitale dans la lutte contre le VIH, le virus du Sida. L’essai clinique d’un nouveau medicament, le lenacapavir (Gilead Sciences), mene sur des jeunes femmes en Afrique, une population particulierement a risque, s’est montre extremement concluant. Depuis 2022, cet antiviral est indique pour les patients souffrant d’une infection au VIH resistante aux traitements classiques. Mais cette fois, c’est comme moyen de prevention qu’il a ete teste. Avec un succes certain, puisqu’a l’issu de l’essai, 100% des femmes l’ayant teste avaient echappe a l’infection.
Une etude menee sur plus de 5000 femmes non atteintes par le VIH
Les resultats de ces travaux ont ete publies le 24 juillet 2024 dans le New England Journal of Medecine. Les chercheurs ont « mene un essai controle randomise de phase 3 (permettant d’evaluer l’interet du nouveau medicament sur une large cohorte, ndlr), en double aveugle, impliquant des adolescentes et des jeunes femmes en Afrique du Sud et en Ouganda« . On parle ici de pres de 8100 participantes agees de 16 a 25 ans, dont 5338 etaient initialement negatives au VIH.
Au sein de ces 5338 personnes, certaines femmes ont recu le lenacapavir en sous-cutane toutes les 26 semaines, tandis que les autres ont recu chaque jour une dose orale de emtricitabine/ tenofovir alafenamide (Descovy) et celles d’un troisieme groupe une dose orale quotidienne de emtricitabine/ tenofovir disoproxil fumarate (Truvada).
L’emtricitabine, le tenofovir alafenamide et le tenofovir disoproxil fumarate sont des medicaments antiretroviraux, utilises pour lutter contre les infections au VIH. Selon la Haute Aurorite de Sante, le tenofovir alafenamide a ete developpe « pour diminuer les concentrations plasmatiques de tenofovir afin d’ameliorer la toxicite renale et osseuse observees avec le tenofovir disoproxil fumarate« . Grace a ce protocole, les chercheurs pouvaient comparer l’efficacite du lenacapavir et du Descovy par rapport au Truvada, un traitement plus ancien et qui jouait ici le role de traitement controle.
Lire aussiSida : un septieme patient guerit du VIH avec une nouvelle methode
Aucune infection pour les femmes ayant beneficie des injections de lenacapavir
Sur les 5338 personnes qui etaient initialement negatives pour le VIH, 55 ont ete contaminees au cours de l’etude. 39 infections ont eu lieu dans le groupe Descovy (2136 participantes) et 16 dans le groupe Truvada (1068 participantes). En revanche, aucune femme traitee avec le lenacapavir (2134 personnes) n’a ete infectee. « L’incidence du VIH avec le lenacapavir etait significativement inferieure a l’incidence de base du VIH et a l’incidence du VIH avec F/TDF (Truvada, ndlr) », souligne l’etude. Quant a l’incidence du VIH avec Descovy, elle « ne differait pas significativement de l’incidence de base du VIH« . En outre, les auteurs de cette etude ne relevent pas de probleme de securite concernant le lenacapavir. Seulement des reactions frequentes sur le site d’injection.
Lire aussiSida : des chercheurs decouvrent ou se cache le VIH dans les cellules infectees
Une prise en charge plus discrete pour eviter la stigmatisation
Le lenacapavir pourrait donc offrir une protection plus performante contre le VIH que les antiretroviraux utilises actuellement, et cela en seulement deux injections par an contre un comprime quotidien. Les resultats etaient si concluants que l’essai a ete arrete prematurement afin de permettre a toutes les participantes de beneficier de la protection des injections, explique le laboratoire dans un communique.
« Pour une jeune femme qui ne peut pas se rendre a un rendez-vous dans une clinique de ville, une jeune femme qui ne peut pas conserver ses medicaments sans etre confrontee a la stigmatisation ou a la violence, une injection seulement deux fois par an est l’option qui pourrait la proteger du VIH« , s’est felicitee aupres du New York Times Lillian Mworeko qui dirige la « Communaute internationale des femmes vivant avec le VIH ».
Reste a savoir par quel moyen ce medicament se retrouvera finalement sur le continent africain. Quelle logistique pour la production ? Quel prix ? Et quand sera-t-il finalement accessible ? Autant de questions qu’il faudra trancher pour observer une vraie rupture dans la prise en charge du Sida sur le continent africain.